Bonus / Chronique :
Se soumettre ou se démettre ? (2ème partie)
PUBLIÉ LE 14 Octobre 2019
Poursuivons en octobre, la liste des bons conseils avant une intégration/acquisition. Après une première liste en septembre, à lire ici, voici donc quelques points énumérés par Lucas FORTUIT, à surveiller de très près !
Les trois autres joyeusetés suivantes inhérentes aux fusions-acquisitions concernent plus particulièrement la cohabitation des structures rapprochées…
5° L’acquéreur n’est pas quitte pour autant, notamment si la mariée n’est pas aussi belle qu’elle le paraissait au moment du deal.
Ne croyez pas que les forces vives de l’acheteur dormiront sur leurs deux oreilles après les agapes. Notamment si le prix d’acquisition est surfait ou si on a surévalué les atouts ou les charmes de la belle, et au cas où les parties ont omis de souscrire une garantie de passif conséquente. Encore faut-il qu’ils en aient la même interprétation lorsqu’elle existe ! Les hors-bilans réservent parfois des surprises de taille.
La mer est tout aussi agitée pour les équipes de l’absorbeur. Il s’agit, entre autres gageures, d’intégrer les fonctions supports et terrain des entités jusqu’à l’osmose. Souvent, l’acquéreur ne veut plus voir qu’une tête ! Dans la pratique, ce sont souvent les réseaux commerciaux qui renâclent le plus à évoluer dans une nouvelle écurie de course avec de nouvelles règles de conduite… Notamment, lorsqu’ils sont en responsabilité d’uniformiser les catalogues de produits et de services disparates et de les mettre au diapason et aux normes techniques de l’acquéreur.
Certains d’entre vous ont certainement en tête des groupes d’assureurs ou y œuvrent au sein desquels certains éléments ne jouent toujours pas le même concerto plusieurs années après leur fusion…
6° Les DSI sont aux premières loges et imposent souvent leur calendrier aux acteurs.
Sur le plan opérationnel, la migration des systèmes d’information est parfois un casse-tête kafkaïen qu’on ne peut balayer d’un coup de poing sur la table et qui perdurera si le DSI du paquebot amiral est un rien conservateur et hostile aux progiciels non made à la maison ou au Web-assurance. Des rapprochements d’entités ont échoué pour des bugs imprévus malgré des audits poussés et des incompatibilités de systèmes d’exploitation prévisibles !
S’il est plus aisé de réduire le coût les fonctions techniques, administratives et comptables, les budgets informatiques des entités concernées, eux, vont s’additionner, voire s’accroître pour une durée indéterminée…
On ne redécoupe pas les systèmes informatiques avec une scie comme on le fait pour des organigrammes ou des portefeuilles de contrats. Dans certains cas, ce sont les prestataires informatiques et de progiciels en place qui trinqueront… Encore faut-il que ces derniers aient toujours pignon sur rue pour assurer la maintenance des systèmes ! Dans d’autres cas, ceux seront éventuellement les assurés et les bénéficiaires de contrats qui en pâtiront comme l’indique La Lettre de l’Assurance 1443 du 23 septembre 2019 « Les mouvements de portefeuille, les fusions et les rapprochements successifs comme les changements de systèmes d’information ont mis à mal les services de gestion »…
De là à penser que les intérêts et objectifs des utilisateurs, des DSI et ceux de leur direction générale ne sont pas toujours en phase… Ce ne sont pas les éditeurs de logiciels qui prétendront le contraire. Ils savent que le temps de chaque partie n’est pas le même et si on ne peut pas aller plus vite que la musique, la note finale à payer peut être vertigineuse.
7° Le cédant n’est plus là pour siffler les coups francs et ceux qui ne le sont point.
L’actionnaire vendeur, repu, le cas échéant, peut-il imaginer que l’opération fusionnelle peut engendrer un train sec d’humiliations pour ses troupes et un TGV de mesures coercitives pour ceux qui œuvrent dans la salle des machines malgré les éventuelles garanties sociales négociées en annexe au deal ? On touche là aux avantages de place non contractuels dont bénéficiaient antérieurement les employés et les dirigeants du cédant et qui seront rabotés, voire supprimés, le temps passant.
Sans doute pas. Surtout, s’il s’est retiré des affaires après le pacte… le pactole, dirais-je, pour certains.
Néanmoins, si vous vous sentez trahi, vous pouvez en tirer parti en revêtant rapidement les habits et les couleurs du nouveau prince… Une condition pour faire le deuil d’un passé professionnel qu’on n’est pas toujours près de revivre.
Comment ? En lui rendant grâce et en remisant définitivement vos petits privilèges atypiques dans un tiroir, tels qu’une place de parking, des remboursements de menus frais, un bureau avec vue imprenable, un fauteuil à bascule, des présences à des séminaires ou à des congrès savants, une prime de salissure non soumise aux prélèvements sociaux, par exemple. Leur suppression sera vécue comme inique et inéquitable, vexatoire, voire perçue comme une atteinte à vos droits et à votre standing. Une injustice susceptible d’attiédir votre motivation et votre flamme à l’endroit de l’acquéreur… Vous me comprenez, sinon lisez la suite dans la troisième partie.
À suivre…
Lucas FORTUIT
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