PORTRAIT :
Florence Tondu-Mélique,
ascensions et réflexions
PUBLIÉ LE 18 Janvier 2024
Florence Tondu-Mélique, alors directrice générale de WTW France et Luxembourg, était l’invitée du Petit déjeuner Off de La Lettre de l’Assurance le 1er février 2024. Voici son portrait.
Le rendez-vous a lieu à Puteaux, au milieu des cartons, quelques semaines avant le déménagement de WTW. Florence Tondu-Mélique, souriante mais attentive, nous rejoint dans une salle de réunion. L’exercice du portrait n’est pas évident, mais elle l’a bien préparé et ne manque aucune étape.
Florence Tondu-Mélique est née le 13 décembre 1976, à Grenoble, dans l’Isère (38).
Elle révèle un attachement pour Grenoble, « car vous n’êtes pas sans savoir que c’est l’une des dix premières métropoles au monde en nombre de brevets par habitants », nous apprend-elle, parce que nous ne le savions pas. « Stendhal disait que Grenoble, c’est une montagne au bout de chaque rue. La montagne a été mon premier terrain de jeu », raconte-t-elle.
Elle grandit à Grenoble au sein d’une famille « de serviteurs de l’État et de la ation », explique-t-elle d’emblée. « Mon père était ingénieur dans la tech […] Ma mère et mes grands-parents dans différents corps de services publics » ajoute-t-elle.
Florence Tondu-Mélique pose ses limites, c’est le jeu.
Quel type d’élève était-elle ? « Je garde un très bon souvenir de mes études et de mon parcours, avec le goût d’apprendre », répond-elle. Elle apprécie également « le côté social » de la vie scolaire. Une donnée importante qui la suivra dans les études supérieures et sa vie professionnelle.
Elle est une bonne élève, admet-elle du bout des lèvres, laisse passer un temps de réflexion et affirme que « la matière intellectuelle est quelque chose qui m’a toujours nourrie. J’avais un vrai plaisir à apprendre. Ce n’est pas l’exercice scolaire mais bien la curiosité et le besoin de s’ouvrir à différentes matières intellectuelles ».
« Assez longtemps j’ai voulu faire médecin, et puis le parcours scolaire m’a permis de me réaliser autrement. » Florence Tondu-Mélique explique cette volonté par « la question de l’utilité pour autrui ». Ce marqueur s’exprime actuellement. « Je retrouve cette notion aujourd’hui dans un rôle de dirigeant que je considère comme étant ce que les anglo-saxons appellent, servant leadership, cette notion de dirigeant au service du collectif et de l’ensemble des parties prenantes, donc de ses équipes et de ses clients », ajoute-t-elle.
Le voyage plus que la destination
Avant d’arriver à ces fonctions managériales, Florence Tondu-Mélique doit faire des choix. « En terminale, j’ai eu l’opportunité de rentrer dans une prépa qui pouvait être scientifique comme économique. Je pense que l’envie de m’ouvrir à de nouvelles choses m’a orientée », analyse-t-elle. Elle rejoint HEC où elle retient « la formation, mais aussi la richesse humaine, l’engagement au bureau des élèves, la participation à une équipe de raid aventure ». La dirigeante poursuit son déroulé. Il y a ensuite « une année d’alternance à Singapour, où finalement il n’y avait qu’un pas à sauter entre le goût de la montagne et le goût des voyages et de l’aventure », ouvrant la porte sur de nouveaux sujets.
À HEC, elle n’a pas de métier précis en tête. Elle cherche ses mots quand on lui demande et finit par expliquer : « Je réfléchis alors en termes de ‘qu’est-ce qui va me nourrir ?’ plutôt qu’en termes de destination. C’est sans doute la raison pour laquelle j’ai choisi de rejoindre McKinsey. C’est avant toute chose pour la richesse intellectuelle, pour le défi de s’exposer à des problématiques stratégiques renouvelées, mais aussi pour le fait de travailler dans des petites équipes rapprochées où se créent des relations très fortes au travers des réalisations que l’on fait en équipe. »
Au-delà de ces côtés positifs, McKinsey lui donne l’opportunité de faire un MBA à Harvard. Pendant deux ans, elle intègre « la section B du campus, un amphithéâtre de 90 personnes qui a été ma classe pendant deux ans », explique-t-elle avec entrain. Le cursus réunit des profils de tous horizons professionnels et de tous les pays du monde. « L’amitié s’est créée dans un groupe qui reste très soudé. Nous nous retrouvons sur le campus tous les cinq ans et nous sommes toujours en contact. Nous nous suivons aussi dans nos parcours de vie » Elle prend pour exemple les débuts des confinements pendant la crise sanitaire et les visios au cours desquelles, du Pérou à la Nouvelle-Zélande, chacun vivait la situation à son échelle, avec les répercussions dans sa vie personnelle et professionnelle.
Du conseil à l’assurance
Si elle confie qu’elle aurait pu faire toute sa carrière dans le cabinet de conseil, elle est un jour démarchée par son ancien patron pour le rejoindre chez AXA IM. « Nous étions au début de la crise financière (en 2007, ndlr) il fallait continuer à mettre l’entreprise sur une trajectoire de performance et de croissance », explique-t-elle. Florence Tondu-Mélique ne découvre pas le monde de la finance et de l’assurance. Elle a travaillé au sein de la practice finance et gestion d’actifs chez McKinsey.
Elle entre complètement dans l’assurance en rejoignant Hiscox Europe en 2013, puis Zurich en 2017 et enfin WTW en 2023. « L’assurance n’est pas un choix fait complètement au hasard quand on y réfléchit », explique-t-elle. Ce qu’elle a fait, et elle explique : « Cette dualité entre les perspectives micro et macro est intéressante dans l’assurance. Micro parce que nous sommes vraiment dans le quotidien des gens, des entreprises, au plus profond des territoires. Et en même temps, nous sommes dans une science et une matière qui est si transversale aux économies et aux sociétés que l’on peut avoir cette vision d’ensemble qui dépasse aussi les géographies. Les grands risques auxquels nous sommes exposés transcendent tout ça ».
Elle fait également le parallèle avec ses deux grandes passions : la montagne et le piano avec une notion de « verticalité et d’horizontalité ». « La montagne est très verticale, mais une fois au sommet, c’est tout un horizon qui se dévoile », explique-t-elle. « La musique, c’est pareil, l’horizontalité se fait dans le partage avec autrui ».
Florence Tondu-Mélique a commencé le piano toute petite et en a toujours joué, dit-elle dans un rire. « J’aimerais y consacrer plus de temps […] J’essaie d’en jouer quand je peux trouver un moment, mais c’est de plus en plus difficile », précise-t-elle, avant d’ajouter qu’elle aime partager la musique avec ses enfants.
Le cœur aux sommets
Son grand coup de cœur, c’est la montagne.
Un héritage familial et de ses racines grenobloises ? Elle réfléchit. « Comme dans toutes choses, il y a un fil rouge, une transmission qui permet de commencer. Après c’est la façon dont vous vous faites votre propre chemin. Dont vous faites vôtres les choses qui vous sont transmises. Pour aller plus loin, pour aller ailleurs, pour aller autrement », répond-elle. Elle pratique la montagne dans sa globalité, « monter et descendre, sur la neige ou la glace, sous le soleil aussi », résume-t-elle dans un rire.
Au fil du temps, Florence Tondu-Mélique a ajouté une passion pour les voyages. Étudiante, elle finance ses envies d’ailleurs par des petits boulots, puis parcourt le monde avec un sac à dos et des amis, « des sables de Tombouctou aux toits des trains en Équateur, jusqu’aux steppes d’Asie centrale ».
De toutes ses expériences, elle retire des apprentissages. « La montagne : c’est une combinaison. On garde les pieds bien ancrés sur terre, mais on regarde vers le haut. On doit prendre des décisions sous contrainte. Les voyages, c’est un autre type d’apprentissage. C’est aller vers l’inconnu, explorer, composer avec des situations inédites… Je crois beaucoup en ces aptitudes que l’on peut développer au-delà des parcours scolaires ou du monde du travail. Des aptitudes qui vous renforcent dans la vie professionnelle et dans vos compétences. Ce sont un petit peu des mises à l’épreuve de vous-même, et ça développe une forme de courage et de résilience. »
Dans sa façon de faire, Florence Tondu-Mélique estime avoir « fait les choses pour un plaisir intrinsèque, pas pour quelque chose en résultante ». Elle poursuit : « Je fais des choses que j’aime et qui me nourrissent. D’ailleurs, le piano, la montagne, au fond c’est quoi ? C’est de la technicité, c’est la précision du geste, la persévérance, du travail… Et ça on ne peut le faire que si on aime ce que l’on fait. » Nous lui demandons si il y a une forme de défi : « Oui, parce que dans le défi il y a quelque chose de ludique, une notion de plaisir ». Le moteur de son voyage, quelle que soit la destination.
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