PORTRAIT :
André Renaudin,
racines et mémoire vive

André Renaudin, directeur général d’AG2R La Mondiale, est l’invité du Petit déjeuner Off de La Lettre de l’Assurance, le 3 novembre 2021, après un premier passage le 13 septembre 2018.

La matinée est déjà bien avancée et l’heure du rendez-vous dépassée lorsque André Renaudin, directeur général d’AG2R LA MONDIALE nous accueille. En chemise – cravate, avec son badge autour du cou, nous nous installons dans un « coin salon » du grand bureau qui donne sur le boulevard Haussmann. Attentif, André Renaudin que l’on connaît prompt à raconter anecdotes et souvenirs de l’assurance, se révèle tout aussi volubile quand il s’agit de parler de ses origines. Avec envie et un souci de la précision toujours aussi grand.

La vérité doit éclater : André Renaudin n’est pas né, le 9 décembre 1955, en Alsace ! « Je suis né à Vincennes, à l’hôpital Bégin. Mon père effectuait son service militaire dans le Val-de-Marne et ma mère l’avait rejoint », explique le directeur général du groupe AG2R LA MONDIALE.
Le passage en région parisienne fut rapide, la famille retournant quelque semaines plus tard à Strasbourg avant de s’installer définitivement à Sélestat, lorsque M. Renaudin père entre à l’hôpital de la ville comme chef de service d’ophtalmologie.
L’ainé de trois enfants reste dans sa ville jusqu’à l’obtention de son bac. Il quittera finalement Sélestat pour la prépa et le lycée Kleber de Strasbourg, avant d’entrer à Polytechnique.

L’Alsace et Sélestat – dont il a été fait citoyen d’honneur en juin dernier – sont chevillées au corps du dirigeant. Il a épousé « une camarade de classe » de la ville et sa famille et sa belle-famille sont encore dans la région.
Surtout, son attachement et ses origines sont de notoriété publique. Et pour cause, André Renaudin assure lui-même la promotion de ses racines : « La phrase type ici c’est qu’on ne peut pas faire carrière à AG2R LA MONDIALE si on ne sait pas que je suis de Sélestat ! » s’amuse-t-il. « Ça ne pose aucun problème, puisque tout le monde le sait. Quand un groupe nous rejoint, je le dis lors de la première réunion des cadres », conclut-il.

En vélo sur les ballons

André Renaudin est un Sélestadien passionné, féru d’histoire de l’Alsace. Mais il connaît aussi très bien la région pour l’avoir longuement parcourue… à vélo.
« Je suis cycliste, c’est mon sport, mais je ne me suis jamais considéré comme sportif. Je n’ai pas le mental d’un sportif’ », précise-t-il d’emblée. En clair, pas d’esprit de compétition mais plutôt une idée de franche camaraderie que le vélo lui apporte sur un grand plateau, depuis bien longtemps. « J’ai beaucoup roulé à vélo avec les copains en Alsace. Nous avons beaucoup sillonné la région et les Vosges, nous faisions de grandes balades », confie-t-il. Il profite des dernières années de lycée pour faire de grandes virées. « Nous faisions des sorties parfois longues, de 170 kilomètres. C’était plutôt du cyclotourisme : quand on croisait un monument ou un village qui nous plaisait, on s’arrêtait pour visiter. Le plus loin que l’on ai fait, c’est Mulhouse… »
Il poursuit cette passion au sein du « Club des 12 de Boulogne ». André Renaudin a ouvert une section à Lille et réalise quelques sorties.
Enfant et adolescent, il faisait de l’escrime. Il a repris lors de son passage à Polytechnique, mais il ne reste désormais que le vélo.

Son entrée dans la prestigieuse école ne doit rien au hasard. Pourtant, pendant des années, son choix semble fait. « À la question des professeurs sur ‘que souhaitez vous faire plus tard’, je répondais ‘médecin ophtalmologue’. C’est en première que j’ai changé d’avis, je me suis aperçu que j’avais vraiment envie de faire des maths. » Comme souvent, quelques rencontres vont compter beaucoup dans les choix de l’étudiant. « Quand j’étais en première, celui qui est devenu mon beau-frère, est entré en prépa Math Sup’. J’ai découvert l’existence de cette prépa et j’ai commencé à voir ce qu’était le parcours ». La vision reste pourtant floue sur l’avenir à plus long terme. « Je ne pensais pas devenir entrepreneur, nous n’étions pas une famille d’entrepreneurs… »
L’inspiration viendra d’une source plus inattendue. « J’étais très cocardier et je le suis toujours d’ailleurs. Quand je regardais le défilé du 14 juillet à la télévision, Léon Zitrone disait toujours ‘et voici les Polytechniciens, les meilleurs’. Je dois à Léon Zitrone l’ambition d’entrer à Polytechnique », avoue-t-il amusé. Toutefois, l’école Polytechnique n’est pas une fin en soi, et André Renaudin n’est pas plus avancé quant à la suite de sa carrière. « J’étais matheux, pas ingénieur. C’est comme ça que j’ai découvert le corps de contrôle des assurances. Mais s’il y avait eu un corps de contrôle de la banque, j’aurai peut-être fini banquier ! ».

Contrôle et cabinets

Faire l’X n’a pas été une partie de plaisir. « Il y avait l’isolement à Palaiseau, les matières étaient difficiles, et l’année de coupure de service militaire avait cassé le rythme des études ».
En effet, après un été 1976 caniculaire, André Renaudin effectue son service militaire, qu’il estime « physiquement dur ». Transmetteur dans un régiment en Allemagne, le service s’effectue ensuite doucement, loin de la pression de la prépa et de celle qui l’attend à Palaiseau. « On n’avait rien à faire », résume-t-il.
À sa sortie de l’école, il entre au contrôle des assurances. L’occasion pour le jeune André Renaudin de rejoindre Bercy et de découvrir un secteur qu’il ne connait pas.
« On trouve des gens très sympas dans l’assurance. Mais ce qui a vraiment changé ma vie, c’est d’être appelé au cabinet du ministre. Je n’aurai probablement pas supporté de passer 20 ou 30 ans au contrôle ».
En septembre 1984, il rejoint le cabinet de Pierre Bérégovoy, ministre de l’Economie et des Finances, en qualité de conseiller assurance.
Son arrivée au cabinet du ministre a été rocambolesque.
Il doit, en 1984, entrer au cabinet de Jacques Delors, qui est alors ministre de l’Economie et des Finances.
Les choses traînent un peu mais André Renaudin n’est dans l’attente que d’une formalité : « serrer la main de Jacques Delors. J’attendais depuis trois mois quand on me prévient que je dois me tenir prêt. On m’appellera pour rencontrer le ministre. La journée passe et on ne m’appelle finalement pas. Le soir, j’ai découvert au JT de 20h que le gouvernement Mauroy avait démissionné ! ».
Nous sommes le mardi 17 juillet 1984, et André Renaudin décide de rejoindre sa femme en congés en Alsace quelques jours plus tard.
Finalement, il est rappelé lors d’un dîner chez sa belle-soeur et raconte cette drôle de journée. « J’ai abrégé le dîner et suis allé me coucher. J’ai pris la route à 2h du matin, j’étais chez moi à 7h le temps de me préparer et à 8h je repars. A 9h j’étais au bureau et à 9h15 le téléphone sonnait. J’ai rencontré Jean-Charles Naouri, directeur de cabinet de Pierre Bérégovoy à 15h03 et j’entrais au cabinet à 15h05. Dans la vie, il faut aussi avoir un peu de chance. »
Celle d’André Renaudin, qu’il saisit, change alors complètement sa vie et l’installe durablement dans le secteur de l’assurance.
« Ça a changé ma vie. J’ai croisé des gens formidables qui étaient les présidents des sociétés en place. C’est pendant cette période que j’ai rencontré pour la première fois Patrick Peugeot ».

L’entreprise en nouveau terrain de jeu

De poste en poste, il découvre les entreprises du secteur de l’assurance de l’intérieur. Aux AGF, il occupe pendant 7 ans le poste de directeur de l’international. Une expérience formatrice mais épuisante. Il parcourt le monde et rejoint avec bonheur la FFSA en 1998 qui lui permet de se stabiliser sur Paris, travaillant avec trois présidents différents.
En 2005, Patrick Peugeot, alors président de La Mondiale, le fait venir à ses côtés. André Renaudin organise le rapprochement avec AG2R qui le propulse à la tête de ce groupe d’un genre nouveau.
Au-delà ce sa carrière qu’il peut raconter avec de nombreux détails, André Renaudin se considère, sans prétention – et par bien des aspects à juste titre – comme l’une des mémoires du secteur. Il est à l’image de la Bibliothèque humaniste de Sélestat qui possède un véritable trésor de manuscrits et livres des XV et XVIe siècles, une collection phénoménale de mémoires et de souvenirs accumulés consciencieusement au gré du temps.

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