PORTRAIT :
Brigitte Bouquot,
des défis et des risques
PUBLIÉ LE 7 Février 2019
Brigitte Bouquot, présidente de l’Amrae, est l’invitée du Petit déjeuner Off de La Lettre de l’Assurance, le 21 février 2019. Voici son portrait.
La rencontre avec Brigitte Bouquot se fait dans un Palace parisien. Pourtant, la présidente de l’Amrae est d’une grande simplicité, loin du décorum cosy et hors de prix du bar de l’hôtel. Elle est en avance, mais doit partir plutôt que prévu. Portrait express, à la voix douce, d’une grande efficacité.
Brigitte Bouquot est née à Marseille, en 1956, sans doute en janvier ou février puisqu’elle précise immédiatement « l’hiver où le port de Marseille a gelé ! ». Aucune trace d’accent, pourtant, dans la voix de la présidente de l’Amrae, qui garde un profond attachement à cette ville et sa région. C’est que la vie parisienne a raison des accents…
Troisième fille d’une famille de quatre, Brigitte Bouquot grandit à Marseille, « dans une atmosphère très aimante, pas forcément plus protégée mais au milieu de la nature, avec plein de cousins… ». Une famille nombreuse qui forge un caractère de « fonceuse, très sportive ». « Je faisais du Volley-Ball, j’aurais pu jouer pendant des heures, j’adorai ça », se souvient-elle. Et quiconque voudrait railler sa taille trouvera une réponse : « je ne suis pas grande, je ne smashais pas, mais je faisais de très bonnes passes ».
Ces souvenirs de soleil et de famille tranchent subitement avec ce bar d’hôtel sombre et froid. Ce qu’elle admet également. « C’est très loin de l’ambiance de la région parisienne ».
Cocons
Dans cet environnement familial, Brigitte Bouquot s’épanouit. Mais le milieu, « bourgeois un peu traditionnel », ne lui offre que peu de perspectives. « Il n’y avait pas de plans pour moi. Ce qui était important c’était la famille, l’éducation, le sport… nous faisions des choses très bien », lâche-t-elle, sans finir réellement sa phrase. Très bien pour devenir une bonne épouse, sans doute, mais elle n’ira pas jusque là.
Malgré les réticences et plus encore les doutes de sa famille, Brigitte Bouquot entre au lycée, en première scientifique. « Ils me disaient que je n’y arriverais pas, que j’allais craquer ».
L’adolescente rêve d’être médecin, puis prof de mathématiques. « Par facilité », explique-t-elle, avant de dévoiler, après un laps de temps assez long et dans un rire, « j’ai eu peur d’aller au contact des malades, de faire des piqures, la peur de faire du mal aux gens. J’ai préféré me tourner vers les maths ».
Ses ambitions ne sont alors pas très claires, ni même réelles.
« Le déclencheur a été mon prof de maths, en terminale, qui m’a fait passer le concours général. Elle m’a fait répéter chez elle. Je me souviens très bien, nous étions trois – et je n’ai rien eu au concours général – et dans son escalier, il y avait des messages de Paul Eluard, notamment ‘j’écris ton nom liberté’… »
Cette rencontre ouvre des perspectives nouvelles à Brigitte Bouquot, quand cette professeure recommande une entrée en prépa. « Elle m’a fait comprendre qu’il y avait autre chose, que j’étais bonne en maths ». Elle rejoint la prépa. Ses parents laissent faire en estimant toutefois que « c’est une folie, parce que c’était un lycée de garçons. Nous étions 3-4 filles sur une trentaine d’élèves ».
Son idée d’alors est de devenir prof de maths. C’est à la fois assez original dans la tradition familiale – son père est un entrepreneur – et raisonnable en termes d’ambition. Pour le moment.
Car tout s’enchaîne très rapidement. En partie parce que le temps presse pour réaliser ce portrait, mais également parce que ses résultats en prépa lui ouvrent les portes de Polytechnique.
« J’ai alors réalisé que je devais quitter mon petit cocon ».
X et choix
À l’X, commence une nouvelle histoire. « Nous nous retrouvions entre nous, les provinciaux, parce que les Parisiens ne nous parlaient pas, parce que nous étions tous un peu gênés en voyant que nous n’étions pas issu de dynastie de polytechnicien. On avait un peu honte de nos familles, mais quelque part, ça a donné des amis… »
En quelques mois, Brigitte Bouquot échange donc un cocon plutôt familial, contre un nouveau cocon amical, constitué de camarades impliqués dans la même aventure. C’est important pour elle, qui « n’aime pas la solitude. C’est un juste milieu à trouver ». C’est un critère qui orientera également ses choix, notamment quand se pose la question de la carrière professionnelle.
A la fin de son passage à l’école des Mines, elle doit choisir. « J’ai eu à faire un choix très structurant, entre la recherche et l’enseignement et le monde de l’entreprise. Mais l’X est une école de complexes ! Quand vous voyez les majors qui règlent les problèmes en 5 minutes alors que vous il vous faut 3 heures de travail, c’est dur ! », s’amuse-t-elle. « L’idée d’être une besogneuse dans un monde de recherche ne me séduisait pas trop. La curiosité et le besoin de manger l’ont emporté », conclut-elle en référence à un besoin nouveau de gagner sa vie.
N’étant « absolument pas ingénieur », Brigitte Bouquot se dirige vers les métiers « de la finance, mais la finance de l’entreprise ! » Au gré de sa carrière, elle gravit les échelons et s’occupe assez rapidement de risques et d’assurances.
Son temps libre l’est de moins en moins. A quelques jours des Rencontres de l’Amrae 2019, on imagine la pression à son maximum. « Nous faisons partie des privilégiés de la société, nous pouvons partir en vacances facilement. Mais paradoxalement, j’ai l’impression que je décroche moins qu’avant. L’entreprise me rappelle, ensuite je pense à l’association, je suis constamment occupée ».
Adolescente, Brigitte Bouquot faisait de la voile, sur « un 420, je barrais, j’emmenais ma petite sœur. Dès que je retrouve du temps, je me remets au bateau. J’adorais cette liberté, ce sentiment de liberté… »
Des 4 filles, elle était la plus fonceuse, la plus sportive, « la plus masculine aussi ».
Mais Brigitte Bouquot est toujours tenue par une quête de légitimité et un sentiment de devoir en faire plus. « La difficulté est de trouver l’équilibre entre le fait de se dire ‘je ne vais pas y arriver’ et la réalisation, qui, au final, est souvent mieux faite ».
Son vrai décrochage, c’est la nature. « Partir au ski avec des copains. Je cherche des sorties plus authentiques. Mais ça a changé, j’ai changé. Les files d’attente dans les musées, les aéroports, ce n’est plus ce qu’on recherche ».
Brigitte Bouquot a beaucoup dessiné mais elle manque de temps pour le faire. Elle apprécie particulièrement les réalisations qui demandent un minimum de matériel. « Un papier un crayon, c’est très simple et très fort ». Son grand-père paternel, qu’elle admire, fut le premier à s’installer à Marseille.
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