PORTRAIT :
Catherine Touvrey,
franche sans compter
PUBLIÉ LE 27 Mars 2018
Catherine Touvrey, DG de HARMONIE MUTUELLE, est l’invité du Petit déjeuner Off de La Lettre de l’Assurance, le 11 janvier prochain, après un premier passage en 2018. Voici son portrait, tel que publié en mars 2018.
Le bureau est dépouillé, décoré de quelques estampes d’Hiroshige. Catherine Touvrey nous reçoit seule. Elle répond avec le sourire, toujours, et une certaine économie de mots, prenant parfois le temps de mûrir sa réponse avant de la donner. Le moment est plaisant mais maîtrisé, sans pour autant nous laisser une impression d’avoir raté quelque chose. La directrice générale d’Harmonie Mutuelle ne cache pas ce qui lui plaît et lui déplaît. Elle est pudique, mais franche. Évidemment.
À sa voix accentuée, il était difficile d’imaginer que Catherine Touvrey était née à Paris. Et pourtant, elle voit le jour le 27 juillet 1968, dans le 12e arrondissement. La famille habite alors en région parisienne, entre Ermont et Pontoise (95) et Catherine Touvrey y reste jusqu’à l’âge de 11 ans. S’ouvre alors la période « franc-comtoise ». « Quand on me demande, je dis que je suis franc-comtoise, bien qu’en réalité, j’ai vécu presque plus longtemps en région parisienne qu’à Besançon », s’amuse-t-elle.
« Mes attaches sont là-bas, toute ma famille est en Franche-Comté », mais elle ne considère pas pour autant l’arrivée à Besançon comme un retour aux sources.
« Les années parisiennes ont beaucoup compté. J’ai des souvenirs d’école primaire et j’ai toujours des ami(e)s de l’école primaire, deux ! », rit-elle franchement. Son départ n’altère pas les liens : les amitiés sont très présentes dans la vie de Catherine Touvrey.
Elle se considère comme une élève moyenne, « juste au niveau de ce que mes parents demandaient. Ils étaient exigeants, mais ils n’avaient pas le bac, alors tout ce que je faisais était très bien ». Elle passe la bac et poursuit avec une prépa « de province » pour une école de commerce. « Je me souviens qu’il y avait dans la cour une vieille statue rouillée et que les profs nous disaient ‘regardez bien, c’est le dernier élève passé par ici qui a intégré HEC ». Catherine Touvrey rit, et corrige dans la foulée « en fait quelques élèves intégraient chaque année les écoles parisiennes ».
Elle entre à l’ESC Reims, « le hasard des concours, une école qui était bien classée à l’époque ».
Des années bisontines, elle garde de très bons souvenirs avec une nouvelle fois pas mal d’ami(e)s. « Quel souvenir j’en ai ? C’était des années très sympa », sourit-elle, « ça fait longtemps que je n’y avais pas repensé ! On sortait beaucoup, c’était très agréable et puis le handball m’occupait pas mal déjà ».
Jeux de mains (et de ballons)
Catherine Touvrey a beaucoup pratiqué le handball dans sas jeunesse, à Saint-Vit. « Je n’ai pas joué très longtemps, mais je me suis beaucoup investie. Je me suis toujours intéressée aux sports de haut niveau ». Elle appréhende le sport dans sa globalité : « à la fois sur le plan sportif pur mais aussi sur le plan psychologique. C’est l’un des sports dans lesquels on voit bien le poids de l’ascendant mental d’une équipe sur l’autre, le rôle de coach ».
Catherine Touvrey y apprend « pas mal de choses. Le sens de l’effort, le sens du feedback. Pour jouer en collectif en permanence, il faut s’appuyer sur l’équipe. Ça fait un style de management un peu atypique parfois. Et puis on apprend que rien n’est jamais acquis ».
Elle reste « dans l’ambiance du handball ». L’un de ses fils est « passionné », donc elle y passe pas une partie de ses week-ends. « Pas pour coacher une équipe, il faudrait que je travaille à mi-temps, mais je fais la table de marque (où sont notés les scores) ».
Aujourd’hui, elle nage et court, mais reconnaît ne pas être « fan des grandes distances. Je n’ai jamais compris pourquoi on faisait un marathon par exemple », lâche-t-elle dans un éclat de rire, avant de corriger « je plaisante, je comprends bien ». Mais ce n’est pas pour elle. Pourtant, « j’ai besoin de sport, si je n’ai pas ma dose, ça ne va pas… », avoue-t-elle.
Ne pas juger
Le départ à Reims ne la gêne pas. « C’était l’insouciance, c’était bien : plus de repas de famille le dimanche ! Les matches de handball étaient le samedi, je n’y échappait pas… »
À cette époque, elle ne rêve pas d’assurance, mais souhaite plutôt « voyager, bouger et rencontrer du monde. Je n’avais pas un métier en ligne de mire. Même la mutualité, je n’en avais pas entendue parler ».
Comme tant d’autres, Catherine Touvrey entre dans le monde de l’assurance par hasard. « À la fin de mes études, j’avais eu plusieurs pistes. Je voulais plutôt travailler dans l’industrie. J’avais eu plusieurs propositions et notamment pour faire de l’audit international dans un grand groupe industriel. Le père d’un copain était secrétaire général pour une fédération de mutuelles et il cherchait quelqu’un qui n’y connaissait rien, un jeune. Ça m’a semblé amusant, intéressant. J’y suis resté trois ans et j’y ai appris beaucoup. »
Catherine Touvrey s’épanouit à ce poste au sein de la FMF. Elle retrouve Paris et découvre le monde mutualiste, ses coulisses politiques comme la multitude des sujets traités. « Je voulais vraiment être en entreprise et ne pas dire aux autres ce qu’ils devaient faire », comme on lui proposait en cabinet d’audit.
Elle quitte la petite structure pour « passer à autre chose ». Elle a 24 ans et choisit de rester dans le monde mutualiste, mais code de l’assurance cette fois-ci, en acceptant la proposition d’un directeur de la MACIF.
Elle reste sur Paris, parce que « Niort, ce n’était pas possible, surtout pour mon mari ». Le directeur lui trouve finalement un bureau dans la capitale.
Parler de son entrée dans le monde du travail ravive des souvenirs.
Avec toute sa franchise, Catherine Touvrey se souvient de sa « première colle » en prépa, quand un professeur lui a dit : « Mademoiselle, vous n’êtes pas faite pour ces études ». « Sur le coup, ça fait bizarre, c’est assez raide. J’ai souvenir aussi de quelques entretiens d’embauches. Il y a des tas de gens qui ont des jugements définitifs sur vous. C’est très drôle rétrospectivement. Ça rend modeste, il ne faudrait pas trop juger les autres », conclut-elle sans se départir de son grand sourire.
Le boulot n’arrive pas jusqu’à la maison. « C’est assez étanche, je compartimente, j’ai plusieurs vies », explique-t-elle. « J’ai des amis qui n’ont pas su que j’avais des postes à responsabilité pendant des années. Je n’ai pas besoin de ça pour vivre. » Une modestie qu’elle assume. « Je me sens parfois un peu décalée, mais ça ne me pose aucun problème. Le fait de ne pas chercher à être conformiste, je l’ai toujours eu ».
L’introspection est lancée. « Ce n’est pas le décalage à tout prix, mais chercher à ne pas penser comme tout le monde, c’est une recherche. Agir c’est encore autre chose. Mais sinon nous sommes tous des clones, nous faisons tous la même chose. Ce n’est pas très intéressant. » Par exemple, pendant trois-quatre ans, elle coupe totalement avec l’actualité quotidienne, immédiate. « L’ambition était d’arriver à retrouver une vision de long terme, plus profonde ». Une quête de sens et d’esthétique dans la démarche qui se retrouve aussi dans sa passion du Japon, un pays « qui me fascine beaucoup, à la fois par la juxtaposition d’éléments historiques très très forts et la capacité à devenir l’une des premières puissance mondiales en étant coupé du monde pendant des siècles. »
Une autre particularité japonaise est « la maîtrise personnelle », que Catherine Touvrey trouve assez reposante, « même si c’est pour eux une grand souffrance ». Elle tente même le parallèle avec New York. « Je me disais que les New Yorkais étaient tout aussi reposants, mais pour des raisons complètement inverses : parce qu’ils ne se posent pas de question ! »
La directrice générale estime être guidée par « l’impact que l’on peut avoir sur les autres, l’attention qu’il faut leur porter ». D’ailleurs, son week-end idéal est un mélange de nature « forcément » et de plusieurs éléments, des fêtes, de bons repas qu’elle cuisine « quand il n’y a pas d’obligation », des ami.e.s et une fin de week-end « quand tout le monde dîne à la maison le dimanche soir ».
Histoire de remettre tout son monde en harmonie.
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