PORTRAIT :
Marie-Laure Dreyfuss,
toute en découvertes
PUBLIÉ LE 4 Janvier 2022
Marie-Laure Dreyfuss, déléguée générale du CTIP sera l’invitée du Petit déjeuner Off de La Lettre de l’Assurance le 6 avril 2022. Voici son portrait.
Début décembre 2020, la rencontre avec Marie-Laure Dreyfuss se fait dans le grand bureau du CTIP. La déléguée générale est prudente avec l’exercice du portrait, répondant aux questions avec mesure, petit à petit. Elle peut parfois être déroutante, assénant des « non » à certaines interrogations en sondant son interlocuteur d’un regard bleu rieur.
Marie-Laure Dreyfuss est née à Paris, le 22 septembre 1959. Elle se dit « très parisienne. Je me sens à l’aise à Paris. Je ne ressens pas la même chose dans une autre ville, ici, je suis chez moi ». Le constat a du poids car Marie-Laure Dreyfuss a beaucoup bougé.
Son enfance est itinérante, au gré des affectations professionnelles de son père. Elle avoue avoir des souvenirs de quand elle était très très jeune, dès 2 ans. « Nous avons habité en Belgique quand j’étais très petite, puis nous sommes partis en Amérique du Sud ».
Ces mouvements sont à la fois positifs et difficiles. « Pour un enfant, c’est compliqué de tout lâcher mais il y avait toujours une part de découverte, la promesse de rencontrer de nouvelles personnes, d’apprendre une langue étrangère. J’ai appris l’espagnol en Amérique du Sud au point d’abandonner l’anglais dans mes études. »
Marie-Laure Dreyfuss ne se considère pas comme une bonne élève, mais plutôt comme une enfant « extrêmement dissipée » et « extrêmement jeune ». Explications avec de longs silence. « Je suis entrée en 6e à 9 ans… j’avais beaucoup d’avance. En classe, j’étais très jeune… », confie-t-elle, et d’ajouter : « Très jeune et très dissipée, je travaillais peu ».
Ne vous attendez pas à l’entendre dire qu’elle était la bout-en-train de la classe. « Je lisais tout le temps, je faisais autre chose… » Sa passion se résume alors à la lecture, qu’elle pratique en toute circonstance.
Faut-il en conclure que l’école ne l’intéressait pas ? En partie oui. « Je savais lire très tôt, j’ai dû être très pénible pour les instit’ et au collège puis au lycée (long silence), il y avait des matières que j’aimais beaucoup et d’autres que je détestais, voilà », finit-elle par lancer. « Je ne travaillais pas du tout ! », s’amuse-t-elle avec le recul.
Il faut en réalité y voir une constance. De son propre aveu, Marie-Laure Dreyfuss était comme ça… tout le temps, partout, avec tout le monde. « J’étais assez dynamique, je fatiguais un peu mon entourage », reconnaît la déléguée générale du CTIP dans un souffle.
La tentation est alors de lui faire faire du sport, forcément, pour dépenser un peu de cette énergie. « Ils ont essayé, mais pas trop non plus. J’ai fait un peu de danse et j’aimais bien. Mais en bougeant souvent, ce n’est pas facile de s’inscrire dans une pratique longue. Je n’ai pas créé dans l’enfance et l’adolescence des loisirs qui sont restés. »
Pérou sans nostalgie
Si l’Amérique du Sud, plus précisément le Pérou, tient une telle place, c’est parce que Marie-Laure Dreyfuss y reste de 8 à 13 ans, « des années importantes, ça marque quand même ».
Elle en garde des souvenirs contrastés. « C’est un pays très dur, à l’époque il y avait des tremblements de terre, ça me terrorisait. Le mode de vie était complètement différent du mode de vie européen, avec du personnel à la maison et le retour a été très compliqué ». Transposer ses habitudes en arrivant, puis en repartant, s’avère difficile. « On était dans le pays mais sans y être. On était dans des communautés d’étrangers qui se retrouvent. L’accès à la population locale était plus difficile ».
Elle y est retournée il y a quinze ans. Portée par la nostalgie ? « Pas du tout, je n’ai aucune nostalgie », confie-t-elle en riant. « J’y suis revenue avec un regard d’adulte, tout est différent. Ça ne me rappelait rien, tout juste la maison ou le collège… »
Parmi ses passions, Marie-Laure Dreyfuss aime plus que tout « la lecture et la musique classique et depuis toute petite ! » Ce sont des passions… dévorantes ! « Je passais mon temps à lire et à écouter de la musique, ça agaçait profondément mon entourage. Dès que j’ai su me servir du tourne-disque, j’ai mis de la musique classique. Mes parents avaient d’autres choses, mais dès que j’ai découvert le classique, plus aucune musique ne m’intéressait. Ça a pris tout l’espace… », se souvient-elle.
À l’adolescence, « j’écoutais un peu des groupes de rock, mais je faisais plus ça pour être en phase avec les copains et copines, ça n’était pas aussi bien que la musique classique. »
Le retour en France était compliqué, « mais sans plus ». « Je n’avais pas de nostalgie de ce que je quittais, j’étais contente de découvrir un nouveau lycée, de me faire de nouveaux amis… »
À l’adolescence, elle rêve de travailler au Bureau international du travail, mais sans précision, sans imaginer les études nécessaires ou le poste. « Je ne projetais rien. J’étais très enfantine. Le monde à l’extérieur ne m’intéressait pas, mes parents me laissaient dans un cocon de l’enfance même à l’adolescence. J’étais un peu sous pression de ce que je travaille bien, que j’ai mon bac et de faire de bonnes études, mais c’est tout. J’étais assez libre. »
Enfant guidée puis libérée
Le bac en poche, elle file vers Sciences Po, « parce que mes parents le voulaient, ils avaient choisi pour moi et je ne m’en occupais pas. Je n’avais pas la maturité pour ça. Je pouvais l’être sur certains points, mais pas sur celui-ci. »
L’entrée à Sciences Po provoque le départ du cocon familial. Mais habitant Paris, elle aurait pu rester chez ses parents. « J’ai quitté mes parents brutalement. On avait des désaccords, je voulais vivre ma vie, je suis partie », résume-t-elle avec pudeur.
Elle doit alors travailler pour subvenir à ses besoins. « J’ai rapidement passé les concours de la Banque de France. À cette époque, je ne calculais plus, j’étais dans l’urgence. »
À l’occasion d’un stage d’étudiante à la Banque de France, elle a l’opportunité de préparer les concours d’entrée dans l’institution. Ce qu’elle parvient à faire à sa sortie de Sciences Po. C’est une nouvelle vie qui s’ouvre à elle et des découvertes.
L’une d’entre elle est la misogynie plus ou moins affirmée du monde du travail. « J’ai aussi découvert partout où je suis passée de la misogynie. Dans tous mes postes, c’était de petites remarques ou des choses plus graves. Tout était plus simple pour les hommes, de la façon de s’habiller à l’organisation des emplois du temps. Tout ça a changé, mais c’est récent… », relève-t-elle, englobant toute sa vie professionnelle.
Elle reste prudente sur la Banque de France, où elle restera trente ans. « J’ai traité énormément de matières et de sujets. Sur un plan personnel comme sur un plan professionnel, c’est extrêmement formateur. C’est une école de la rigueur, avec une exigence très très élevée. Ça a fait de moi quelqu’un de très exigent. ». De postes en postes, elle découvre Chartres, Bruxelles, Bordeaux.
« Après Bordeaux, je me suis un peu posée, à Paris », confie-t-elle. « Je n’ai jamais trouvé un endroit où m’installer vraiment. C’est pas que je ne m’y plaisais pas, mais je trouvais intéressant d’aller voir plus loin, ce qu’il se passe ailleurs. Plus par envie de découvrir autre chose que parce que je me sentais mal quelque part. Donc quand on m’offrait un poste lointain, j’acceptais. »
Son attachement à la capitale est fort. Voyageuse, elle n’envisageait pas la « maison de campagne », mais avec le temps, l’idée a fait son chemin. « C’était pour moi comme d’avoir un fil à la patte. Mais quand les enfants sont partis, nous avons acheté une maison près d’Avignon et j’apprécie y aller. Les surfaces parisiennes sont trop petites, c’est une maison de famille où nous pouvons tous nous retrouver… », confie Marie-Laure Dreyfuss, qui a trois enfants. Elle n’y va pas le week-end, mais plutôt sur des périodes plus longues, « et spécifiquement pendant les confinements », s’amuse-t-elle, sans s’empêcher de voyager pour autant. Pour le week-end idéal, ce sera en dehors de Paris, dans une capitale européenne par exemple « parce que j’adore découvrir de nouvelles villes. C’est touristique… » Parce que bouger et découvrir font partie de ses racines.
À ne pas manquer