PORTRAIT :
Philippe Michel Labrosse,
six cordes à son arc
PUBLIÉ LE 7 Octobre 2023
Philippe Michel Labrosse, directeur général d’Abeille Assurances, sera l’invité du Petit déjeuner Off de La Lettre de l’Assurance le 18 octobre 2023. Voici son portrait.
Pour des raisons d’agenda, le rendez-vous se fait à distance. Dans une salle de réunion d’Abeille Assurances, Philippe Michel Labrosse, directeur général de l’assureur, se plie à l’exercice du portrait, sans difficulté ni réticence, malgré une certaine appréhension qu’il reconnaîtra en fin d’entretien. Le temps est compté pour un portrait tout en efficacité et confidences.
Philippe Michel Labrosse est né le 20 février 1965 à Maisons-Laffitte, dans les Yvelines.
Fils et petit fils « d’institutrices de l’école publique », il a vu le jour dans « une clinique MGEN, qui existe toujours d’ailleurs », s’amuse-t-il d’emblée. Il grandit à Saint-Germain-en-Laye, et habite toujours dans les Yvelines.
Enfant, Philippe Michel Labrosse se décrit comme un « élève qui passait correctement. J’ai plus bossé dans le supérieur », lâche-t-il.
Question profession rêvée, rien de marquant ne lui vient à l’esprit. « Je ne me souviens de rien en particulier, je ne vais pas vous dire que je voulais devenir assureur, on le devient toujours un peu par hasard », répond-il. Peut-être parce que l’important est ailleurs : « Je faisais beaucoup de sport, et surtout des sports collectifs », confie-t-il. « J’avais deux passions. Une pour le rugby mais Saint-Germain-en-Laye est la ville du Paris-Saint-Germain (où les équipes du club s’entraînent, ndlr) et avoir des copains qui jouent au foot a fait que je passais plus de temps à jouer au football qu’au rugby… Alors que j’étais inscrit dans le club de rugby », rit-il franchement. « Mais j’ai une chance extraordinaire : j’ai compris que je n’avais pas beaucoup de talent, ça m’a fait gagner beaucoup de temps dans la vie ! »
Du Hellfest à Marly-le-Roi
Il se décrit comme « un rugbyman moyen, un footballeur moyen. C’était assez frappant à Saint-Germain-en-Laye. Beaucoup de mes copains rentraient au centre de formation mais je n’ai jamais vu l’un d’entre eux percer ! Eux y ont cru, moi jamais, j’ai gagné du temps », s’amuse-t-il, fier également de nous voir interloqué. S’il suit encore beaucoup le rugby, « j’ai joué très longtemps au foot. J’ai joué pendant plus de dix ans au Pecq et j’ai fait mon dernier match avec l’équipe première à 40 ans ».
Mais sa très grande passion qui ne l’a jamais quitté et sur laquelle « il ne faut pas me brancher, je peux en parler pendant des heures », c’est la musique et plus spécialement la guitare. « L’avantage c’est qu’à la différence du rugby, ça peut durer », rit-il.
Cette passion naît un peu par hasard. « Ma sœur aînée s’était vue offrir une guitare. Elle n’en faisait pas beaucoup et je pense que vers 11 – 12 ans, je devais m’ennuyer et je tournais autour de l’instrument… », se souvient-il. Pur autodidacte, il ne suit pas de cours mais travaille modérément, puis beaucoup. « C’est plus tard, quand je suis allé au Brésil. J’ai appris la bossa nova, le jazz. Mais à la base je suis beaucoup plus rock, même hardrock », affirme-t-il le plus sérieusement du monde. Sur nos encouragements, il décrit ses ‘guitar heroes’ : « Pour moi, tous les instrumentistes sont très bons, et les nouvelles générations sont des virtuoses. Mais un grand guitariste arrive à briser quelque chose, apporte un son, amène quelque chose dans la technique ». Et de citer beaucoup de grands guitaristes, comme Wes Montgomery, Jimmy Hendrix, Jeff Beck, Eddy Van Halen ou encore Steve Vai. Un vrai fan. « Je suis allé à Munich ou Barcelone pour voir un groupe qui passait, j’ai fait plusieurs fois le Hellfest, mais je n’y vais pas cette année malheureusement », enchaîne-t-il. « Ce que je trouve formidable, c’est un peu l’appel du héros. Tout le monde fait bien mais il y en a un qui brise quelque chose. »
Philippe Michel Labrosse avait raison, on ne l’arrête plus. « Je suis devenu assureur parce que je ne pouvais pas devenir guitariste », lance-t-il dans un grand rire.
Il apprend patiemment avec des livres de méthodes, accord par accord, et puis par expérimentations.« Nous sommes au tournant des années 80, la musique est omniprésente. Rapidement j’ai monté mon premier groupe et j’ai toujours joué ensuite. »
Transmission et politique
Une passion qu’il a transmis à ses deux fils, « qui eux sont allés au conservatoire, au début à reculons mais maintenant ils sont très contents ». Le directeur général d’Abeille Assurances ne les épargne pas : « l’un d’entre eux est un virtuose, le deuxième est un très bon guitariste », il rit et ajoute « non mais ça va ».
« La musique est la grande passion, la grande émotion de ma vie. Je suis passionné de jazz et d’opéra, il y a très peu de choses qui ne me plaisent pas. Mais je sais aussi qu’une vie de musique ne m’aurait pas rendu heureux, ça ne m’aurait pas développé humainement et professionnellement ».
À côté des ces passions, il y a des études, qu’il n’envisage pas à rallonge. « J’ai fait Sciences Po Paris et c’est là que je suis devenu plus bosseur. Je n’avais pas envie de m’attarder dans les études. En finissant Sciences Po en 1987, il fallait faire le service militaire. C’était un peu structurant ce truc là », s’amuse-t-il. Il pense finir tranquillement son cycle à la fac mais « ils m’ont vite rappelé à l’ordre et je me suis retrouvé bidasse avec les cheveux courts en décembre 1987. »
Après, il hésite mais estime plus intéressant « d’aller dans l’action ». « Je n’ai jamais eu d’envie d’entrer dans le service public, mais j’étais attiré par une carrière politique. J’étais élu local à Marly-le-Roi et j’ai beaucoup travaillé pour le monde parlementaire », dévoile-t-il.
Ses parents n’ont jamais fait de politique, François Mitterand vient d’être élu, une ère nouvelle semble s’ouvrir. « Moi mon truc, c’était l’Europe fédérale, une aspiration sociale libérale ». Il est proche de ces cercles politiques et se retrouve « engagé », cette fois de son plein gré, dans l’équipe qui prépare la liste fédéraliste aux élections européennes. Il décrit ce courant comme un centre gauche sociale libéral. Il a été collaborateur de Jean Béranger, maire de Marly-le-Roi jusqu’en 1989.
Pour l’élection municipale de 1989, il est « placé sur la liste. On tenait la mairie qui était promise à François-Henri de Virieu. C’était naïf, mais à aucun moment je n’ai pensé qu’on pourrait perdre les élections. On a perdu de 150 voix : elles ont changé ma vie », s’amuse-t-il encore une fois. « J’avais des propositions pour rejoindre des cabinets ministériels, ce qu’on fait des copains, mais j’ai choisi le privé », explique-t-il.
Il va au bout de son mandat de conseiller municipal dans l’opposition et lâche la politique. « Je n’ai jamais regretté, jamais ! Quand j’en ai vu certains rentrer au gouvernement – Bernard Cazeneuve a été premier ministre quand même – j’étais content pour eux parce que je sais que la route a été compliquée », lâche-t-il, en détaillant des parcours longs et tortueux. « C’est très aléatoire… Moi j’ai eu la chance d’échapper à ça », conclut-il.
Pasion entreprise
Rien de tel que de se tourner vers une nouvelle marotte : l’entreprise. « Je suis un passionné de l’entreprise et ce n’est pas une posture. Il y a plein de chemins pour y arriver, et ce ne sont pas des mauvais chemins. Il faut être ambitieux et mettre cette ambition au service de l’entreprise. Il faut jouer en équipe, en cordée parfois. On peut vraiment s’y accomplir », détaille-t-il.
À la fin des années 80, il fait un passage dans un cabinet de conseil, « où on prend des jeunes pour travailler dur pendant que les consultants seniors ne font pas grand chose ». Il doit se pencher sur les rémunérations dans les entreprises, les retraites. « Retraite, épargne salariale, ressources humaines… tout ça était cohérent et je me dis que l’assurance, ce n’est peut-être pas idiot ». Il entre dans un petit groupe de prévoyance, comme adjoint au directeur financier. Après quelques années, ça ne l’intéresse pas trop et s’apprête à partir « faire autre chose ailleurs. Le DG me rattrape et me propose de créer un poste de développement. Je n’étais pas commercial, je n’y connaissais rien mais la politique m’avait fait faire du porte à porte, des distributions sur les marchés… ». De son travail sur les réseaux et de rencontres en rencontres, il entre dans l’assurance via PFA – Athena en entame sa carrière sur la grande scène de l’assurance qui l’emmènera jusqu’au Brésil à la fin des années 90, pour le groupe Allianz. « J’y ai passé presque trois ans, ça a été formidable, et je ne m’en suis presque jamais remis. J’ai gardé une fibre… » C’est aussi un glissement vers une partie plus internationale et plus technique du métier.
Pour conclure, rien de tel qu’un bon week-end. Pour Philippe Michel Labrosse, ce sera « chez moi, à Saint-Cyr-sur-Mer. Quand dans la même journée je peux faire un peu de vélo, sortir mon bateau, un verre de rosé et des amis sur la terrasse, je me dis que j’ai de la chance ».
Il conclut le portrait en ajoutant avoir eu « de la chance d’avoir des patrons fantastiques, Jean-Philippe Thierry, Jean-François Lemoux et Laurent Mignon. J’en suis très reconnaissant, je sais d’où je viens ». Une prestation sans fausse note pour ce portrait, alors qu’il était craint.
* Ce portrait a été légèrement modifié après publication.
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